Les crooners à la française, ça existe. Les noms de Dany Brillant, Stan Laferrière, Daniel Huck (quand il veut bien), Eddy Mitchell, Michel Leeb, Goy Marchand, voire Michel Jonasz, sans aller jusqu’à remonter à Yves Montand et à l’élégant Jean Sablon, la représentent à des degrés divers de bonheur. Il faudra désormais compter avec Yves Carini.
Ce disque très sympathique à l’esprit détendu et swinguant, constitue une entrée assez exquise et en tout cas bienvenue. Justesse, clarté d’énonciation (les « m », les « s » et les « t » sont particulièrement bien servis), timbre agréablement velouté, et surtout sens infaillible du swing, les qualités d’Yves Carini sont évidentes et font merveille dans un répertoire qui mêle un standard, Let’s Fall in Love (sous le titre Est-ce par hasard ?), Le Cimetière des Éléphants d’Eddy Mitchell et une chanson de Gino Vanelli retitrée Doux Poison à des compositions personnelles de belle tenue. Un petit reproche : il aurait fallu réfléchir davantage à la composition de l’album, les six premières plages étant un peu uniformes au plan des tempos. Cela dit, l’autre délice de cet album de bonne compagnie (la chanteuse Viktoria Tolstoy est invitée sur un titre), c’est la section rythmique exceptionnelle accompagnant le chanteur, composée du délicat pianiste danois Niels van Doky, de l’excellente contre-bassiste Pierre Boussaguet et de Jeff Hamilton, batteur exceptionnel qui se produit régulièrement avec Diana Krall. On l’aura compris, si l’on aime une ambiance « cool », un crooner qui balance et une rythmique parfaite, il faut se précipiter sur cette réussite unique dans le paysage musical français.